Immobilier : 5 Millions de Français en situation de vulnérabilité énergétique
L’Insee a publié une évaluation de la vulnérabilité énergétique des ménages en France métropolitaine en 2021 : 17,4 % des foyers, soit 4 815 000 ménages, étaient considérés comme vulnérables et ont dû consacré une part particulièrement élevée de leurs revenus aux dépenses énergétiques.

© adobestock
En 2021, en France métropolitaine, 4 815 000 ménages étaient en situation de vulnérabilité énergétique liée au logement, soit 17,4 % des ménages : les dépenses conventionnelles d’énergie liées à leur résidence principale excédaient 9,2 % de leur revenu disponible.
Ce seuil correspond au double de ce que doivent au plus dépenser la moitié des ménages français.
Ces presque 5 millions de ménages ont donc dû consacrer une part particulièrement élevée de leurs revenus aux dépenses énergétiques, par rapport aux autres ménages pour maintenir un confort thermique standard dans leur logement.
Ces résultats sont issus d’un rapprochement original mené par l’Insee entre données fiscales et données issues des diagnostics de performance énergétique. Ils permettent de constater que les ménages aux revenus modestes, mais aussi ceux résidant dans des logements mal isolés, avec des modes de chauffage peu efficaces, sont particulièrement concernés par la vulnérabilité énergétique.
Le climat détermine fortement l’ampleur de la vulnérabilité énergétique
Le taux de vulnérabilité des ménages varie fortement selon les territoires, notamment en fonction de la rigueur du climat, mais aussi de la densité de l’habitat ou des revenus des résidents.
Les espaces ruraux, dont le parc résidentiel est organisé autour de l’habitat individuel, souvent de grande superficie, avec un recours au fioul encore fréquent, ont en général des taux de vulnérabilité énergétique plus élevés. Dans le rural non périurbain, se conjuguent en outre fréquemment revenus modestes et logements insuffisamment isolés.
Dans le Doubs, la Loire et le Puy-de-Dôme, la rudesse du climat détermine presque à elle seule la vulnérabilité énergétique, supérieure de 3 à 5 points à la moyenne métropolitaine. Dans les Hautes-Alpes, l’impact du climat est si marqué que le département a un taux de vulnérabilité 6 points plus élevé que la moyenne, malgré des logements mieux isolés et des revenus plus élevés.
Le Massif central, les Cévennes, mais aussi des départements du Grand-Est et de Bourgogne-Franche-Comté, soit 19 départements au total, cumulent un climat rigoureux, un parc résidentiel aux caractéristiques peu favorables et des revenus modestes. Les taux de vulnérabilité énergétique sont souvent très élevés, avec plus d’un quart des ménages concernés dans 16 de ces départements.
Les départements, situés par exemple sur les pourtours du Massif central ou dans les Hauts-de-France, le parc de logements, composé plus qu’ailleurs de maisons de grande taille avec un recours plus fréquent au chauffage au fioul, explique l’essentiel d’un taux de vulnérabilité élevé. Dans plus des deux tiers des cas, s’ajoute l’effet d’une structure des revenus fortement défavorable.
La région parisienne (à l’exception notable de la Seine-Saint-Denis où la structure des revenus seule conduirait à une hausse du taux de vulnérabilité de 5,5 points), les départements comportant de grandes métropoles ainsi que le littoral méditerranéen sont, rapportés à leur population, moins concernés par la vulnérabilité énergétique que le reste du territoire..

Près des trois quarts des ménages en vulnérabilité énergétique occupent un logement classé E, F ou G
Parmi les ménages vulnérables, 71 % vivaient dans des logements classés E, F ou G, une proportion presque doublée par rapport à la moyenne des ménages.
Les dépenses au m² varient selon plusieurs critères, synthétisés par le DPE. Ainsi, les dépenses énergétiques totales sont bien moins élevées en cas de climat doux : en 2021, en moyenne, dans l’Hérault, un ménage devait dépenser 1 260 euros pour maintenir son logement dans un confort thermique standard contre 2 280 euros en Lozère.
Les dépenses varient également fortement selon la qualité énergétique du logement, dont l’indice d’isolation est l’un des marqueurs principaux. En moyenne, les dépenses conventionnelles atteignaient 2 010 euros pour les logements à isolation médiocre, contre 1 150 euros pour ceux à isolation très performante.
Enfin, le mode de chauffage utilisé est lui aussi un facteur principal : non seulement les prix des différentes énergies ne sont pas les mêmes, mais l’efficacité des installations n’est pas équivalente. Le chauffage au fioul s’accompagne ainsi de dépenses conventionnelles bien plus élevées qu’avec les autres types d’énergie, 2 910 euros contre 1 710 euros en moyenne, aux conditions tarifaires de 2021. Cet écart perdure, bien qu’atténué, dans une analyse à surface, climat, degré d’isolation et ancienneté du logement identiques, lorsqu’on compare par exemple un logement chauffé au fioul plutôt qu’un logement analogue chauffé principalement à l’électricité.
Parmi les ménages vulnérables énergétiquement, 4 sur 10 sont en situation de pauvreté
Parmi les ménages vulnérables énergétiquement, 44,4 % étaient pauvres alors qu’en 2021, ces derniers représentaient 14,6 % de l’ensemble des ménages. Les dépenses énergétiques conventionnelles, indépendantes des comportements des ménages pesaient plus lourdement sur le budget des ménages à faibles revenus.
De plus, les ménages occupant les logements aux étiquettes DPE les moins favorables avaient plus souvent des revenus faibles. Cependant, 12 % des ménages vulnérables énergétiquement disposaient d’un niveau de vie supérieur à celui de la moitié de la population.
Inversement, parmi les ménages pauvres, 53 % étaient en situation de vulnérabilité énergétique pour leur logement. Mais occuper un logement à diagnostic A, B ou C permet de diminuer très fortement le risque : seuls 24 % des ménages pauvres étaient alors vulnérables.
La moitié des ménages en vulnérabilité énergétique sont des personnes seules de 60 ans ou plus
La moitié des ménages vulnérables étaient des personnes seules de 60 ans ou plus. Avec un seul pourvoyeur de revenus, les ménages de personnes seules disposaient, en moyenne, de moyens plus modestes (1 960 euros contre 3 400 euros de revenu disponible mensuel moyen, en France métropolitaine), et étaient donc souvent touchés par la vulnérabilité énergétique.
Les personnes seules de 60 ans ou plus avaient, en outre, des dépenses énergétiques conventionnelles 15 % plus élevées que la moyenne. En effet, plus de la moitié d’entre elles résidaient dans des logements à étiquette E, F ou G. Cette proportion étaient sensiblement plus élevée que pour les autres types de ménages, y compris les personnes d’au moins 60 ans en couple.
Enfin, avec une proportion de ménages vulnérables de 15 %, les familles monoparentales étaient nettement plus concernées par la vulnérabilité énergétique que les autres ménages comportant un couple, là aussi du fait de revenus moindres (2 830 euros en moyenne).

La rénovation énergétique, un enjeu pour les propriétaires occupants vulnérables
Malgré des revenus plus modestes en moyenne, 13,5 % des locataires de logements sociaux étaient vulnérables énergétiquement contre 17,5 % des ménages locataires du parc privé. Au sein du parc social, les dépenses énergétiques au m² sont un peu moindres, en grande partie grâce à des modes de chauffage moins onéreux (chauffage urbain, quasi absence de fioul, etc.). Près de 80 % de ces logements ont ainsi un DPE classé A, B, C ou D, contre 57 % dans le parc locatif privé.
Être propriétaire de son logement ne protège pas de la vulnérabilité : 18,3 % des propriétaires occupants étaient vulnérables énergétiquement, contre 16,0 % des locataires. Lorsque les ménages vulnérables étaient propriétaires occupants, 74 % vivaient dans des logements classés E, F ou G, proportion qui tombait à 29 % parmi les propriétaires occupants qui n’étaient pas vulnérables énergétiquement. Ainsi, pour les propriétaires occupants de tels logements, qui représentent près de la moitié des ménages vulnérables, les enjeux de rénovation étaient particulièrement élevés.
Les trois quarts des ménages vulnérables propriétaires occupants de logements classés E, F ou G étaient éligibles à une prise en charge de 60 % ou plus de leurs travaux par le dispositif MaPrimeRénov’ et près de la moitié à une prise en charge de 80 %.
Si on prend l’exemple d’une personne seule hors Île-de-France, ces niveaux de prise en charge concernent respectivement les ménages dont le revenu fiscal de référence est inférieur à 21 800 euros annuels et ceux, particulièrement modestes, pour lesquels ce revenu est en deçà de 14 900 euros annuels.

Les travaux de rénovation : un coût
Pour les ménages vulnérables locataires, la rénovation énergétique serait souvent nécessaire aussi : parmi ceux qui louent à un bailleur physique, 71 % vivent dans un logement classé E, F ou G. Les propriétaires de ces logements disposent en moyenne de revenus nettement plus élevés que les propriétaires occupants en situation de vulnérabilité. Cependant, 17 % d’entre eux sont éligibles à une prise en charge d’au moins 60 % des travaux de rénovation énergétique dans le cadre du dispositif MaPrimeRénov’.
Malgré les aides, la mise en œuvre des travaux de rénovation se heurte encore souvent à deux obstacles. D’une part, les restes à charge peuvent demeurer dissuasifs pour les ménages à faibles revenus. D’autre part, le temps des travaux peut s’accompagner, pour les propriétaires bailleurs, d’une perte temporaire de revenus. Pour ces derniers, les revenus fonciers constituent plus du quart de leurs revenus annuels, en moyenne.