Immobilier (bilan Interkab): Une reprise oui… mais au frein à main selon les agents immobiliers indépendants
Le premier Observatoire Interkab de 2025 livre un constat lucide : selon 8 500 agences indépendantes, la reprise du marché est bien là… mais timide, lente, et freinée par les prix.

© adobestock
Alors que les taux sont revenus à des niveaux accessibles (autour de 3 %) et que les banques se montrent plus actives dans l’octroi de crédits, les agents immobiliers indépendants dressent un constat lucide sur l’état du marché. Grâce aux retours de 8 500 agences connectées via Interkab, l’Observatoire sur le 1er trimestre 2025 révèle une dynamique en demi-teinte, où la reprise s’annonce bien plus lente qu’espéré.
68% des pros estiment que les vendeurs campent sur leurs prix
Près de deux tiers des agents (64 %) constatent un retour des acquéreurs sur le marché. Ce retour s’accompagne de dossiers solides, souvent portés par un taux d’épargne élevé. Pourtant, cette dynamique reste bridée. 8 agents sur 10 estiment qu’ils ne par viendront pas à écouler l’ensemble de leur stock de mandats dans les trois mois à venir. Le climat général continue de peser : incertitudes politiques, tensions économiques, prudence généralisée des ménages.
Pour 54 % des professionnels, le prix constitue le frein principal à l’achat. En parallèle, 68 % des agents estiment que les vendeurs ne sont pas prêts à revoir leurs prix à la baisse. Les vendeurs eux-mêmes entendent profiter de la baisse des taux et dans certains marchés tendus, on observe même une hausse des prix
« Ce qui freine aujourd’hui, ce n’est plus tant l’accès au crédit que peut-être la situation actuelle. Les acheteurs sont là, les dossiers sont solides, l’envie revient… mais dans un contexte économique encore un peu difficile à lire, ils prennent le temps. C’est une posture de prudence et elle peut selon moi poser les bases d’un redémarrage plus durable dans les mois à venir », précise Olivier Bugette. CEO La Boîte Immo.
Le levier du crédit fonctionne… à moitié : 50% constatent un effet positif de la baisse des taux
Alors que les taux sont revenus à des niveaux accessibles (autour de 3%), et que les banques sont bien plus actives dans l’octroi de crédits, on aurait pu s’attendre à une reprise beaucoup plus vigoureuse. Pourtant, seulement un agent immobilier sur deux estime que cette baisse a relancé leur activité.
« La baisse des taux était attendue comme le levier de reprise, et même si elle commence à produire ses effets selon 1 agent immobilier sur 2… on observe un redémarrage progressif, territoire par territoire. Il ne s’agit pas encore d’un rebond généralisé en cette fin de 1er trimestre 2025″, commente Olivier Bugette.
Des signaux de reprise à confirmer dans les trimestres à venir
Au national, les prix progressent de +3 % par rapport au T4 2024, avec une quasi-stabilité sur un an (+1 %). Les délais de vente continuent de s’allonger pour atteindre 141 jours (+7 jours), et la marge de négociation reste stable à -5,5 %. Le volume de biens disponibles à la vente augmente légèrement (+3 %), poursuivant la tendance des derniers trimestres.
« C’est presque un réflexe psychologique : les vendeurs ont anticipé une reprise, et avec elle, une remontée des prix. Résultat ? La baisse des taux est en train d’être annihilée par effet d’anticipation côté vendeur, au lieu de remettre de la fluidité dans le système », ajoute Olivier Bugette.
Le volume de compromis signés est en légère progression : +1 % par rapport au T4 2024. Si cette hausse reste modeste, elle confirme la dynamique enclenchée à la fin de l’année dernière. Elle pourrait annoncer une reprise en cours, bien que timide et encore fragile.
Le taux de casse des compromis repart quant à lui à la hausse : il atteint 18,4 % à l’échelle nationale (+0,7 point), confirmant que les transactions finalisées restent limitées malgré un environnement de crédit plus favorable.
Des contrastes territoriaux très marqués
Certaines zones enregistrent un retour plus net des acquéreurs : Hautes-Pyrénées, Dordogne, Seine-Saint Denis, Val-de-Marne, Lot-et-Garonne. À l’inverse, la Corrèze, la Charente-Maritime ou l’Aveyron affichent un marché plus attentiste.
Même logique pour l’effet de la baisse des taux. En Ardèche, Haute-Loire ou Puy-de-Dôme, plus de 85 % des agents interrogés déclarent qu’elle a eu un impact sur leur activité. À l’inverse, en Corrèze, Charente Maritime ou Lot-et-Garonne, plus de 70 % des professionnels n’y ont vu aucun effet.
« Le marché est redevenu éminemment local. Il n’y a plus de vérité nationale, mais des dynamiques départementales à lire au microscope », poursuit Olivier Bugette.
Résidences secondaires et passoires thermiques : deux marchés à l’arrêt
Le segment des résidences secondaires connaît un véritable coup d’arrêt. 70 % des agents interrogés estiment que ce marché est actuellement figé.
« Même avec de bons profils d’acquéreurs, les dossiers ne vont pas jusqu’au bout. C’est un marché qui est complètement à l’arrêt, notamment dans les zones littorales et en PACA», continue Olivier Bugette.
Concernant les biens énergivores, seuls 21 % des professionnels constatent une hausse des mises en vente malgré l’entrée en vigueur de l’interdiction de location des logements classés G au 1er janvier 2025. Le stock de biens F ou G reste stable (8 % des offres), mais les délais de commercialisation s’allongent : 152 jours en moyenne (+2 jours vs T4 2024).
« On aurait pu s’attendre à un afflux de passoires thermiques sur le marché. Pour l’instant les propriétaires tiennent bon sur la location tant que les baux sont en cours », conclut Olivier Bugette.
Une reprise au frein à main
Derrière les indicateurs nationaux, c’est une réalité plus complexe que révèle ce premier Observatoire de 2025. Une reprise timide, des signaux contrastés, des freins persistants… Pendant longtemps, l’équation immobilière s’est construite autour de trois variables fondamentales : le prix de vente, les taux d’emprunt et le délai de vente. Or, les données de ce trimestre tendent à montrer que ces paramètres, bien qu’essentiels, ne suffisent plus à expliquer, seuls, les mouvements du marché.
