Immobilier : « Avec les promoteurs, faire de la France une nation de propriétaires ! », David Brauman
Fin du Pinel, accès au crédit restreint, chute de la construction… David Brauman, fondateur du cabinet Brauman & K alerte sur les effets d’une politique immobilière en retrait et esquisse des pistes de relance.

© adobestock
Adios ! Le 31 décembre 2024, la France a mis un terme au dispositif Pinel. Depuis
plus de quarante ans, ce mécanisme avait pourtant permis à des millions de nos
concitoyens d’accéder à la propriété. Cette décision vient, espérons-le, clore la
longue série de désaveux du Président de la République et de ses
gouvernements successifs pour l’investissement immobilier.
Qu’on en juge plutôt. Après l’espoir de la loi ÉLAN en 2018, l’immobilier n’a été
que fragilisé : suppression des APL accession, réduction des conditions d’accès au prêt à taux zéro. Et finalement, suppression d’un dispositif emblématique.
Cette approche reste fondée sur une analyse erronée : l’idée que l’argent non investi dans l’immobilier sera investi dans les entreprises. Illusion de la startup nation, reposant sur deux erreurs : d’abord, l’investissement immobilier est le seul qui permet un effet de levier, un accès organisé à l’endettement d’un ménage et aux offres. Deuxièmement, on a minimisé la dimension symbolique et sécurisante de l’investissement dans la pierre.
Résultat : la part du loyer dans le budget des ménages a désormais dépassé la barre de 35 %. C’est plus que le taux d’effort maximal consenti lors d’un prêt bancaire ! Autrement dit, on vous refuse un taux d’effort pour devenir propriétaire et investir, alors qu’on l’accepte pour vous louer un bien et vous appauvrir.
Une politique audacieuse pour une nation de propriétaires
Et si nous mettions le paquet sur l’immobilier neuf pour faire de la France une nation de propriétaires ? C’est un investissement patriote. Gardons-le en tête : l’immobilier neuf, c’est 100 % d’activités non délocalisables ! Les promoteurs sont les meilleurs opérateurs de la revalorisation de territoires, par les activités économiques qui se créent autour, et de plus en plus au sein de projets immobiliers mixant intelligemment habitations et activités économiques. Aussi, trois familles de mesures permettraient de faire de la France une nation de propriétaires.
D’abord, rendre l’immobilier neuf beaucoup plus accessible. Il faut renforcer les dispositifs d’aide, notamment en augmentant les plafonds d’accessibilité pour les jeunes et les classes moyennes. Une extension des conditions d’exemption de la TVA sur les logements neufs aurait par exemple un effet immédiat, en allégeant significativement le montant à investir. Surtout, il faut faciliter les conditions d’accès au crédit immobilier. Celui-ci reste structuré par un modèle de société daté, celui du salariat en CDI. À l’heure des mutations profondes du travail, désormais plus free- que CDI, plus télé- que subordonné, il faut refondre l’accès au crédit, par exemple par la mise en place d’un autre critère d’accessibilité : celui du « bon payeur ». Un accès au prêt immobilier, dès lors qu’on est capable d’apporter la preuve d’aucun incident bancaire ni retard de loyer dans les trois années précédentes.
Il faut également relancer la construction. D’urgence ! Selon la Fédération desPromoteurs immobiliers, seulement 9000 logements neufs ont été mis en vente
en France au 3e trimestre 2024, soit une baisse de 40 % par rapport à la même
période en 2023. Cet effondrement s’accompagne d’une hausse significative des
coûts de construction, notamment en raison des impératifs écologiques. En un
an, le métier de promoteur est devenu un sport extrême !
Pourtant, il est possible de simplifier les procédures d’urbanisme, par exemple par une logique de guichet unique, ou encore de proposer un coup de pouce fiscal aux promoteurs qui maintiennent et livrent dans les délais des projets en zones tendues.
Enfin, il est indispensable de recréer un dispositif incitatif pour l’investissement locatif, mais mieux ciblé que le Pinel et aligné avec les objectifs de transition écologique. Une extension du dispositif Denormandie, prenant par exemple la forme d’un crédit d’impôt pour l’investissement durable (CIID), pourrait stimuler l’investissement dans les logements énergétiquement les plus efficaces (classes A ou B du DPE), tout en répondant aux besoins des ménages modestes.
Un projet au service d’une France plus stable
La disparition du dispositif Pinel peut être vue comme une opportunité. Elle ouvre la voie à une politique plus inclusive, adaptée aux réalités économiques et environnementales de notre époque. Avec une vision ambitieuse et des mesures
adaptées, nous pouvons bâtir une France où chacun peut espérer devenir
propriétaire et sécuriser son avenir. Une France de propriétaires, c’est un pays
plus stable, plus solidaire et plus prospère. C’est aussi la meilleure garantie pour
nos retraites. Je l’ai placardé dans les boulevards parisiens lors des derniers
mouvements sociaux : nos retraites, ce n’est pas dans la rue, c’est dans la pierre
! Alors que de nouvelles échéances électorales se profilent, voici peut-être notre
dernière chance, avant le marasme.